Le Domaine d’Isegorias » L’Ankou : le roi des Korrigans - Contes et légendes de Bretagne, Féerique

L’Ankou

Extrait de La Légende de la Mort d’Anatole Le Braz

L’Ankou est l’ouvrier de la mort (oberour ar maro).
Le dernier mort de l’année, dans chaque paroisse, devient l’Ankou de cette paroisse pour l’année suivante. Quand il y a eu, dans l’année, plus de décès que d’habitude, on dit en parlant de l’Ankou en fonction:

- War ma fé, heman zo eun Anko drouk. (Sur ma foi, celui-ci est un Ankou méchant.)

On dépeint l’Ankou, tantôt comme un homme très grand et très maigre, les cheveux longs et blancs, la figure ombragée d’un large feutre; tantôt sous la forme d’un squelette drapé d’un linceul, et dont la tête vire sans cesse au haut de la colonne vertébrale, ainsi qu’une girouette autour de sa tige de fer, afin qu’il puisse embrasser d’un seul coup d’oeil toute la région qu’il a mission de parcourir.

Dans l’un et l’autre cas, il tient à la main une faux. Celle-ci diffère des faux ordinaires, en ce qu’elle a le tranchant tourné en dehors. Aussi l’Ankou ne la ramène-t-il pas à lui, quand il fauche; contrairement à ce que font les faucheurs de foin et les moissonneurs de blé, il la lance en avant.

Le char de l’Ankou (karrik ou karriguel ann Ankou) est fait à peu près comme les charrettes dans lesquelles on transportait autrefois les morts.

Il est traîné d’ordinaire par deux chevaux attelés en flèche. Celui de devant est maigre, efflanqué, se tient à peine sur ses jambes. Celui du timon est gras, a le poil luisant, est franc du collier. L’Ankou se tient debout dans la charrette.

Il est escorté de deux compagnons, qui tous deux cheminent à pied. L’un conduit par la bride le cheval de tête. L’autre a pour fonction d’ouvrir des barrières des champs ou des cours et les portes des maisons. C’est lui aussi qui emplie dans la charrette les morts que l’Ankou a fauchés.

Lorsque l’Ankou se met en route pour sa tournée, sa charrette est, dit-on pleine de pierres, afin de rouler plus lourdement et de faire plus de bruit.

Arrivé près de la maison où se trouve le moribond qu’il doit cueillir, il décharge brusquement sa charrette, pour faire place à son nouveau “lest”. De là ce fracas de pierraille que l’on entend si souvent dans les logis où l’on veille un mourant, juste à l’instant où celui-ci rend le dernier soupir.